Couleur : gris.
Consigne : action, nouveau job.
- Alors, ça y est ! Tu es en ménage avec ce freluquet ?
- Pierre, il a seize ans, c’est un gamin !
- Je ne te connaissais pas ce côté… cougar !
- Tu es ridicule ! Ce garçon a d’énormes difficultés scolaires, tu le sais aussi bien que moi, et ce n’est pas son manque d’espace personnel qui peut l’aider. Il n’a pas de chambre, où veux-tu qu’il étudie ? Il dort dans leur séjour. Cela ne lui laisse aucune opportunité pour se consacrer à ses cours. De plus, tu connais le côté speedé de Maria. C’est un homme à tout faire pour elle ! De la manière dont c’est parti, il ne peut que finir comme elle, inculte, manœuvre sans qualification, concierge au mieux ! C’est ce que tu lui souhaites ?
- Bah ! Au pire, il cherchera à dépendre d’un CPAS pour passer ses journées à picoler ou à te draguer !
- Oh Pierre, tu m’énerves ! Déjà que Maria me reproche de lui avoir donné une clé de mon appartement et de mettre mon vieil ordinateur à la disposition de son fils. C’est une chambre de bonne avec sanitaires, accessible par l’escalier de service donc sans que j’aie à le voir tous les jours. J’en ai assez d’être réprimandée ! Rentre chez toi !
-
Pourquoi
as-tu fais ça ? Si au moins il te payait
un loyer, mais non ! Ça finira mal,
tu verras…
Un instant décontenancée, elle se récrie, explique que dans certaines circonstances, les sentiments font qu’une personne doit dépasser les limites de la raison. Elle a un très grand appartement, plusieurs chambres inutilisées. L’attitude de Pierre la déconcerte. Il est jaloux mais cela n’excuse pas son animosité vis-à-vis du jeune. Bien sûr, Tomek est un gentil garçon mais en raison d’un environnement sans encouragement, il a tout raté ! En conséquence, il en est réduit à se retrouver en section professionnelle alors pourquoi ne pas lui donner un coup de pouce pour cette dernière occasion d’obtenir un diplôme ?
Tomoe n’a cependant pas décidé de consacrer la totalité de ses loisirs à aiguillonner Tomek… Elle envisage même d’accepter des travaux de traduction en plus de son job d’interprète à la commission européenne. Cela lui sera d’une grande aide pour la soulager de ses charges mensuelles, sur ce point, Pierre a raison.
Depuis que Tomek loge chez elle, Pierre boude et ne vient plus pour les spaghettis des fins de journées tardives. Elle le regrette. Elle se rend compte que Tomek l’empêche tout de même de vivre sa vie aussi librement qu’avant et pourtant, il ne demande rien et est d’une discrétion inattendue…
Le
comble, c’est qu’il lui est impossible de compter encore sur Maria pour faire
le ménage hebdomadaire. Maria ne décolère
pas de ne plus avoir son fils à son service pour des petits boulots dans le
quartier car, cornaqué par Tomoe, il suit à nouveau, et assidument, les cours
de l’institut technique…
Chaque soir, Tomoe s’attarde devant le miroir vénitien sous lequel elle a accroché la clé trouvée grâce au message qu’il recelait. Elle ne parvient toujours pas à deviner comment le plan de son appartement et l’emplacement de la clé a pu être dessiné sur ce papier antique…
À
quoi peut-elle donner accès, cette clé avec un code annexé ? Le mystère est entier. Il devient même obsédant. Contrairement au message qui a révélé sa
cachette, elle n’est pas ancienne. Elle
présente les caractéristiques d’une clé de serrure moderne, peut-être même d’un
coffre bancaire, ce que lui a été suggéré par un serrurier professionnel !
Tomoe n’avait pas soupesé le fait que son travail à la CE et ses travaux de traduction allaient l’amener insidieusement à une fatigue certaine, à un possible surmenage… L’attitude distante de Pierre l’attriste et quand, prudemment, entre deux portes, elle ose évoquer avec lui cet abrutissement, il rétorque qu’il ne peut que lui prescrire des vitamines et des cachets contre les maux de tête ! Elle regrette amèrement cette virevolte alors que Tomek n’est qu’une ombre dans sa vie. Une ombre certes très présente mais une ombre seulement…
⁎
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